(photographies et poèmes - exposition virtuelle sur le site d'Erick Mengual, mai/juin 2017) 

"Adèle Nègre ne se photographie pas, elle cherche, et (souvent) trouve des figures. Le dispositif est simple, un lieu choisi, un appareil posé sur un pied, un ou des miroirs. Le cadrage est décidé pour chaque suite et l’enregistrement se fait par l’intermédiaire d’un retardateur qui ne lui laisse que quelques secondes pour prendre place sur la mini-scène qu’elle a dressée. Tout le travail - mais elle préfère parler de jeu - réside dans la rencontre voulue mais fortuite induite par ce protocole minimum. 
C’est dans des rais d’une lumière zénithale que la figure s’avance (dans Lames), tourne, évolue ou se fige, prise dans les reflets du ou des miroirs. Jouant de la découpe de ce faisceau comme s’il s’agissait d’un objet, d’une fenêtre, d’un coup de pinceau, se décident des gestes. Les états du corps qui en résultent, s’interposant à cet éphémère ballet lumineux, y apparaissent tantôt enveloppés, nimbés, tantôt taillés, blanchis, troués, aspirés, effacés. Tour à tour, par ces artifices, surgissent les mémoires d’une histoire des formes : ici un profil égyptien, là une sculpture de la Renaissance, là encore une danseuse antique… Cas de figures, en somme, que l’écriture de la lumière saisit presque par magie." P.A.
Trait 
par trop 
incisive la lame de lumière 
a l'éclat du verre 
si fin 
que l'étain paillette 
derrière la peau 
pauvre paupière mercurisée 
mais vive encore 
desserrée dans les failles 
irise la plaie 
qu'une neige étreint 
Lame de lumière que ce fil qui tranche la face réfléchie 
les fleurs s'assemblent et se défont 
au temps que porte dans la foulée aveugle s'efface 
un peu le temps indocile 
la passe y était presque mais non 
la dance s'effile et pâle faillit 
le pied éreinté manquant à la lumière 
lasse s'étreint seul
Au sommet de la fatigue 
car j'ai grandi et gravi l'oblique 
l'épreuve de ma matière faite par et dans la lumière 
lumière faite 
des formes textures de pensées battues du sang 
battements 
au lieu bâti de chaque palière 
un jeu une gravure 
haletant l'œil des profondeurs a gravé un trait texte sur l'envers 
que traverse 
l'ombre inquiète 
et le teint assombri à l'œillet je demande 
dans combien de miroirs aurais-je passé 
aujourd'hui 
pâlie combien d'ascensions 
pour naître poussière 
N'être poussière 
naître dans le rai 
involontaire 
avant de retourner
Jongler 
avec 
ce je-ne-sais-pas lumineux 
avec la tache démultipliée 
danser baller franchir 
ce vœu dans l'air 
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Gagner encore en lumière